Denis Weisser, conseiller régional et adjoint PS au maire d’Arcueil chargé du développement urbain et des finances, contact privilégié de Désirs d’avenir auprès de la mairie pour l’organisation de la 3ème Fête de la Fraternité, a accordé un entretien à la rédaction de Militants de l'Espoir à Gauche avec Ségolène Royal.
La mairie d'Arcueil (FM pour MEAGSR)
C’était mardi en fin d’après-midi, à J-4 ; le temps était splendide, un temps comme tout le monde en souhaite un pour samedi prochain. Du point de rendez-vous, la mairie, nous nous sommes rendus sur le principal site de la Fête : le parc départemental du Coteau. Nous y avons retrouvé Benoît Joseph Onambele, coordinateur national de Désirs d’avenir, et Jean Grillon, militant de Désirs d’avenir et du PS, pour quelques prises d’images. Le sujet de la Fête a longuement été abordé, mais aussi celui de la ville d’Arcueil et de la vie d’un élu en banlieue comme la conçoit Denis Weisser : politique par la preuve, réduire la fracture urbaine, être au service des autres et non se servir, dynamique municipale, dynamique du projet de la Fête, mobilisation et fédération, alors que le modèle social français est cassé par la Sarkozye, tout cela en attendant la visite de Ségolène samedi à 16h…
Frédérick Moulin
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À gauche, la ligne jaune de la D61 par laquelle on arrive en venant du RER, on passe devant la mairie puis on tourne à gauche dans l'avenue François-Vincent Raspail ; après l'intersection avec l'Autoroute du Soleil, le rectangle vert bronze du parc du Coteau.
Avec tous mes remerciements à Denis Weisser pour son accueil chaleureux et amical, et à Benoît et Jean pour leur bonne humeur
MEAGSR : dans un des articles de votre blog vous avez écrit : « hier, nous étions plusieurs membres de l’équipe d’organisation de Désirs d’avenir », pourtant dans l’invitation de Ségolène à la 3ème Fête de la Fraternité, elle ne vous présente pas comme un adhérent de Désirs d’avenir, elle vous présente en tant que conseiller régional ?
Denis Weisser : oui, ça c’est normal. Mais je suis à Désirs d’avenir. Comme je dis souvent à mes amis, j’ai la chance, comme dit Ségolène, d’être un pied dedans, un pied dehors. Un pied dedans c’est au PS, je suis effectivement conseiller régional, adjoint au maire à Arcueil, et puis je suis secrétaire fédéral du 94, ça c’est toute la machine interne de la maison Parti socialiste. Et puis j’ai la chance aussi d’être à l’intérieur de Désirs d’avenir, et Désirs d’avenir 94. J’y suis depuis l’origine, et on a travaillé pas mal depuis plusieurs années avec les amis de DA, depuis que DA est parti dans les différents territoires, et le 94 a été un des territoires qui est parti le plus tôt possible. J’ai fait partie de l’équipe, j’ai travaillé avec les amis et la dynamique sur la Fête de la Fraternité avec DA 94. C’est un vrai bonheur parce qu’on n’a pas à les motiver, puisqu’ils sont là dès le départ, ils trouvent ça valorisant.
J’ai été très séduit par le discours de Ségolène dès l’origine, c’est la seule personne qui pour moi, au sein du PS, est capable de faire bouger les lignes, comme le dit Jean-Louis Bianco dans son dernier article [Var Matin du 10 septembre et Le Dauphiné Libéré du 5 septembre 2010, NdlR], de relancer une dynamique. Alors évidemment, ça change les habitudes, ça pète un peu les repères, mais je pense qu’à gauche, on a besoin de tout ça aujourd’hui. Je suis quelqu’un qui reste très attaché aux valeurs, qui est loyal, certains de mes mais diraient maintenant Royal ! Loyal, c’est-à-dire qu’il faut beaucoup de cohérence dans ce qu’on fait, et quand Ségolène part sur un travail autour de la politique par la preuve, moi je me reconnais dans cet axe de vie politique
Vu depuis les piliers de l'A6, l'espace de la scène principale, avec le chemin d'arrivée des artistes au fond (FM pour MEAGSR)
Vous arrivez sur le site. Donc vous allez avoir la scène principale qui va être là.
Des tentes vont être dressées pour couvrir cet espace (FM pour MEAGSR)
Des tentes qui vont être dressées pour couvrir un peu tout cet espace-là. C’est la banlieue, avec la fracture urbaine qu’on peut connaître.
Des tentes tout le long des piles de l'A6 (FM pour MEAGSR)
Là c’est pareil, on va mettre des tentes ici le long pour faire un accompagnement, mettre de la moquette ici, pour que les mamans et papas puissent pousser les landaus, et puis vous arrivez sur ce parc. Dans la continuité des tentes, là-bas on va avoir une estrade sur laquelle on va faire le coin dialogue, discussions, etc. Voilà. Et donc la scène principale, c’est marrant, là vous voyez, il n’y a rien, vous allez voir quand ça va arriver…
MEAGSR : oui c’est vrai que ça fait un peu vide pour le moment.
Denis Weisser : oui, ça fait vide, mais on voulait un espace aussi qui correspond à la banlieue. Ça, ce truc, c’est l’autoroute du soleil, c’est l’A6. Tout le monde se dit l’A6 c’est quoi ? Vu du dessus, c’est ce qui vous amène au soleil ; ils ont le bonjour d’Arcueil à chaque fois qu’ils vont dans le Sud ; et vu de la porte d’Arcueil, des Arcueillais, c’est ce qui a coupé la ville en 2 entre la partie du haut et la partie du sud, et donc il y a une fracture urbaine.
L'A6, "l'autoroute du soleil", symbole de la fracture urbaine à Arcueil (FM pour MEAGSR)
Mon travail en tant qu’élu à l’urbanisme, c’est justement de raccrocher toute cette fracture urbaine qui a été vécue comme un traumatisme par nos habitants. Là, il y a le stade synthétique, où il y aura les enfants.
Le gymnase et les vestiaires vus depuis les piliers de l'A6 (FM pour MEAGSR)
Il y a des gymnases qui sont là, des vestiaires qui sont là sur lesquels on fera un petit accueil, on a la piste ici qui remonte par le dessus, sur laquelle on fera arriver les artistes.
Le gymnase et les vestiaires vus du côté du terrain de sport (FM pour MEAGSR)
MEAGSR : vous avez écrit dans un de vos articles qu’en fait Ségolène Royal vous avait téléphoné le 4 août, vers midi ?
Denis Weisser : c’est vrai ! J’étais chez ma mère en vacances. J’ai la chance d’être bien accompagné en terme familial. Je pense que quand on fait de la politique, vous avez différentes personnalités. Moi j’ai la chance d’avoir des gens, dans mon proche entourage, qui sont issus du monde ouvrier, du monde employé, attachés aux valeurs. Et quand Ségolène m’a appelé, j’ai pris le portable, j’ai décroché, et ma mère m’a dit juste avant de passer à table : « C’était qui ? ». Je lui répond : « C’était Ségolène Royal. ». Elle me répond : « Mais qu’est-ce qu’elle te voulait ? », vous voyez. Et je pense que quand on a la chance d’être accompagné par de la famille comme ça, ça vous permet … de rester à votre place.
MEAGSR : quelles ont été les principales étapes du projet pour la Fête depuis le 4 août ?
Denis Weisser : on avait toute la structure de comment on concilie le projet, ce qu’on avait déjà monté au niveau de la ville, c’était : « Pourquoi Arcueil ? ». Le premier coup de fil que j’ai reçu c’est bien évidemment Ségolène qui m’a donné le feu vert. Son message, ça a été simple : « Denis, c’est chez toi, tu fédères, tu appelles tout le monde, je vais faire une déclaration de presse dans l’après-midi, je veux que tout le monde soit au courant. » Donc j’ai pris mon téléphone et j’ai appelé tous les élus socialistes du secteur, en leur donnant l’exclusivité bien sûr, ce qui me paraissait tout à fait légitime. Il n’y a pas un élu socialiste qui a bloqué l’opération. J’ai bien évidemment appelé le maire d’Arcueil qui m’a dit que Ségolène l’avait appelé pour le remercier ; il n’était pas disponible, mais il a eu le message ; et tout ce vous avez trouvé sur la presse derrière. Et puis après, il y a eu toute la période travail, c’est-à-dire la mobilisation des gens, regarder ce que nous on pouvait faire, les contacts avec les fournisseurs, travailler avec les villes environnantes, regarder qui pouvait nous accompagner, travailler en relais avec la ville.
À partir de là, c’est une dynamique : on avait un peu réfléchi, après il fallait associer tout le monde. Donc la logique projet, comment on met en route aussi bien les élus, comment on peut bénéficier des dynamiques de ville, comment on peut à la fois bénéficier des conseils des amis. Arcueil n’a jamais fait une opération aussi forte, donc il faut se nourrir des expériences des uns et des autres pour pouvoir réussir cette opération-là. Le maire a été très clair, il a porté un certain nombre d’obligations, en disant : « Je ne reporterai pas les activités de ma ville pour la venue de Ségolène Royal et de Désirs d’avenir, donc mes gymnases resteront mes gymnases dédiés au sport, s’ils sont libres, je te les passe. ». Donc ils n’étaient pas libres, ils ont un match régional de basket je crois, et ça a été laissé en activité.
Le cinéma Jean Vilar, ans le centre historique d'Arcueil
MEAGSR : on nous avait dit à un moment qu’il y aurait plusieurs sites à Arcueil ?
Denis Weisser : ici, c’est le site de la Fête. On sort du cinéma Jean Vilar, où là, le matin, il va y avoir des ateliers de 10h30 jusqu’à 12h30, au sein du cinéma Jean Vilar, le cinéma Jean Vilar étant le vieux centre d’Arcueil, le centre historique. Il y aura des ateliers dans deux salles, la grande salle, la plénière, où on a 220 personnes, et la petite salle à côté où on a 80 personnes. L’idée, c’est d’essayer de faire des débats et des explications un peu animés, militants, qui nous permettent d’accueillir 300 personnes, ça c’est le côté cocoon de la maison Désirs d’avenir. Après on a le centre Barbusse, où il y a le lieu de restauration si le gens veulent manger des sandwiches, puis il y a la ballade dans la ville. Moi je trouvais que c’était pas mal d’avoir un lieu excentré pour permettre aux gens de traverser la ville et puis de regarder. C’est une ville de banlieue, il faut la découvrir, en profiter, si les gens veulent s’arrêter, pour s’arrêter dans une pizzeria, un restaurant. On a prévu de mettre la liste des restaurants à côté, ça fait marcher le commerce local, les gens sont très contents. Il y a un petit marché des potiers samedi, pour la journée du patrimoine, beaucoup de choses se font sur Arcueil, il faut que les gens ils arrivent à s’immerger complètement dans la ville. Vous voyez, ce n’est pas une ville qui accueille seulement ; c’est plutôt une ville qui vit, elle accueille, et les gens la découvrent. Je pense que c’est bien dans le concept de la Fête de la Fraternité. C’est une ville de banlieue, c’est une ville qui vit et qui s’arrête pas. C’est comme ça qu’on fonctionne dans notre ville, et c’est aussi ce que j’ai essayé de faire passer le message et a priori le message a été reçu.
Terrain de sport du parc du Coteau, avec au fond le viaduc de l'autoroute du soleil et la partie arcueillaise (DA Paris 15/FM)
MEAGSR : vous ne rencontrez pas de problème dans la dernière ligne droite pour la Fête ?
Denis Weisser : non ; vous savez, l’organisation d’un projet comme ça, ce qu’il faut c’est être dans une dynamique. La dynamique, elle existe. Ségolène est rentrée dans une phase médiatique, il y a aujourd’hui une phase d’unité, de rassemblement, il y a un côté : « Ça suffit ! », quoi, il faut qu’on s’arrête, ça casse de partout, le modèle social, et je pense que la coordination des élus de gauche actuellement va dans ce sens-là, et ça c’est une bonne chose. Il y a vraiment une dynamique. Avec la Fête, on arrive « just in time », juste au bon moment, et cette Fête de la Fraternité, je pense que c’est un moment qui peut marquer. Il faut amener de la vie, du bonheur aux gens, c’est ça l’essentiel du message qu’on a envie de faire passer : « Une ville vous accueille, c’est une ville comme une autre. ». C’est vrai qu’on a des particularités, c’est vrai qu’on est un peu en pointe, vous l’avez soulevé, sur la démarche participative. Je disais tout à l’heure, la démarche participative, elle est bien quand on a les moyens. Quand vous avez des moyens, vous pouvez offrir des choses aux gens, et vous pouvez leur donner des perspectives. C’est pour ça que c’est important que les collectivités locales puissent avoir des moyens, puissent avoir des partenariats, puissent travailler avec les départements, les agglomérations, la région. C’est ça la bonne dynamique qu’il faut entreprendre, c’est ça qu’on a envie de voir, ce ne sont pas une ville qui pleure et des gens qui sont tristes.
Fête de la Fraternité : aller à la rencontre des Arcueillais, à l'occasion du Forum des sports et de la vie associative (FM pour MEAGSR)
MEAGSR : comment les Arcueillais perçoivent-ils la Fête de le Fraternité ? Comment la perçoivent-ils ?
Denis Weisser : on s’est réparti un peu les tâches sur la ville, parce qu’il risque d’y avoir pas mal de monde, donc il ne faut pas que les gens d’Arcueil aient l’impression d’avoir été oubliés. D’abord, on a commencé par ce qu’on fait habituellement toujours sur la ville, c’est-à-dire qu’on va à la rencontre des Arcueillais. On avait une opportunité sur le forum des associations, et donc on y a été, on a discuté, et puis comme ça a fait bouger les lignes, là aussi. Le Parti communiste a fait un certain nombre de remarques, qu’il a adressées au maire directement. En réponse j’ai préféré faire un article sur mon blog, ce qui correspond à dire : moi je suis pour une ville ouverte, je ne suis pas pour une ville s’opposant, je ne suis pas pour une ville sectaire, la ville, elle ne m’appartient pas, elle n’appartient pas au maire, elle n’appartient pas aux gens qui étaient avant ni qui étaient après nous. Je dis toujours aux gens : « Nous, on est de passage. ». Quand on est là, il faut agir, faire avancer, et il y aura des femmes, des hommes qui seront après nous pour faire certainement mieux que nous.
Denis Weisser et Benoît lors d'une prise de vue côté Gentilly (à l'opposé de l'A6 par rapport au terrain de sport) (FM pour MEAGSR)
Je suis joueur de rugby : on marque pas un essai tout seul. Moi je dis : jouer dans les lignes arrière. Je dis toujours à Benoît, mon truc, c’est de voir le trou. Voir le trou, passer les bras, me faire chopper aux jambes, passer la balle et ce sont les potes qui allaient mettre l’essai. Et je disais, il faut préparer les jambes, il faut avoir la vista, il faut avoir le coup de rein pour passer dans le trou, il faut passer la balle, et puis voir le copain qui va mettre l’essai. Et là vous prenez du plaisir, parce que vous savez que si le copain il va mettre près des barres, c’est parce que vous avez fait tout le boulot. Et c’est ça je pense, une équipe municipale. Le maire, il a une autre expression, il dit : « Etre dans une équipe municipale, c’est être dans un bateau. » Alors, on est parfois à la barre, on est souvent dans la soute. On monte ou on ne monte pas sur le bateau. La vie de nos villes, de nos départements, de nos régions, ce sont des vies avec une mer qui est plus ou moins agitée, qui bougent beaucoup. Si on ne veut être qu’à la barre, ça ne va pas le faire, parce que des fois, il faudra laisser le pilotage automatique puis descendre écoper. Et puis il faut avoir beaucoup d’humilité devant les éléments.
MEAGSR : avez-vous un message à passer à tous ceux qui vont venir à la 3ème Fête de la Fraternité ?
Denis Weisser : que la Fête soit belle, comme je l’ai écrit dans le blog ! Oui c’est du boulot, oui c’est comme tous les projets, on s’engueule, même avec mes amis les plus proches, et ça fait partie des projets. Après, il faut savoir où sont les valeurs. Les amis, c’est les amis, on n’est pas toujours là pour leur faire plaisir quand ça commence à ne pas aller. Et puis chacun sa place, c’est toute cette dynamique là qu’on met au service des autres, de la Fête de la Fraternité. Je fais partie des gens qui sont au PS depuis 1995, je ne suis pas un fanatique réputé, j’ai plutôt la tête préparée à raisonner, à travailler, c’est cette dynamique-là qu’il faut mettre au service des autres. Ségolène dit une très belle phrase : « Quand on est élu, on est au service des autres, et on n’est pas là pour se servir. ». Il faut garder ça en tête quoi. Moi ma phrase c’est « On est de passage. ». Ça revient au même. C’est très difficile, la vie d’élu devient de plus en plus compliquée.